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ABC-Animal - Chronique Parasitologie

Les Tiques - Article complet

Introduction
Les tiques constituent un groupe de parasites externes très importants chez les mammifères. En plus de se nourrir de leur sang, les tiques peuvent leur transmettre une grande variété d’agents pathogènes, leur causant ainsi de nombreux problèmes de santé. Et seuls quelques laboratoires spécialisés procèdent à l’identification et l’analyse des tiques. Il est donc important de bien protéger nos animaux, car ils pourraient devenir un réservoir d’infection pour tous les mammières, y compris l’humain.

La tique : ectoparasite, aussi appelée parasite externe
Il existe plusieurs espèces et genres de tiques. Ce sont des acariens qui appartiennent
* à la classe Arachnida (comprennant araignées, scorpions, agents de la gale),
* à la famille des Ixodidæ,
* aux genres Ixodes, Hæmaphysalis, Rhipicephalus et Dermacentor,
* à différentes espèces. Voir le tableau 1.

Tableau 1 – Principales espèces de tiques au Canada


Nom scientifique
 Nom commun
 Ixodes scapularis *  Tique du chevreuil ou à pattes noires*
 Ixodes cookei  Tique de la marmotte
 Autres espèces d’Ixodes :
 Ixodes marxi, I. muris, I. angustus, I. banksi
 
 Rhipicephalus sanguineus  Tique brune du chien
 Hæmaphysalis leporis-palustris  Tique du lièvre
 Dermacentor albipictus  Tique d’hiver de l’orignal
 Dermacentor andersoni  Tique des bois des Montagnes Rocheuses
 Dermacentor variabilis  Tique américaine du chien
Autres espèces étrangères :
Amblyomma longirostre, A. sabaneræ,
A. americanum, A. maculatum et Ixodes bærgi
 
* Espèce la plus retrouvée en Amérique du nord (régions du centre, du nord et de l’est)

Distribution géographique
En général, la tique aime les régions humides avec une végétation abondante, composée d’arbres à feuilles larges. Les animaux migrateurs sont une source de contamination importante lors de leur déplacement. Par exemple, les oiseaux migrateurs, en particulier les Passeriformes, dont le Merle d’Amérique, transportent avec eux des tiques lors de leur migration des États-Unis vers le Canada, contaminant ainsi tout le trajet migratoire.
En Amérique du nord, dans les zones tempérées, on observe deux pics d’infestation de la tique adulte pendant l’année.
Au Canada, on observe ces 2 pics d’infestation d’abord au printemps (mai et juin) et à l’automne (octobre et novembre).
Au Québec, la majorité des tiques viennent de la Montérégie et de la région de Montréal.

Hôtes
Les tiques se nourrissent de sang chez de nombreux hôtes du règne animal : animaux domestiques et sauvages, grands et petits mammifères (bovin, canin, félin, équin, humain, marmotte, lièvre, écureuil, souris), oiseaux, lézards…

Cycle de développement
Chaque espèce de tiques se nourrit de sang. La tique affamée grimpe sur la végétation et tend la première paire de pattes vers l’avant, prête à s’accrocher à un hôte. Une fois sur l’hôte, elle peut errer sur l’animal pendant quelques heures (jusqu’à 24 à 36 heures) avant de se fixer à un endroit donné. La tique absorbe du sang pendant une période de 3 à 14 jours. Au début, l’adulte mesure de 2 à 2,5 mm; mais une fois gorgée de sang, elle peut atteindre 4 à 6 mm de longueur et plus.
Avec un corps en forme de larme plus ou moins ovale, la tique se développe en trois stades successifs : la larve, la nymphe, puis l’adulte. Les larves et les nymphes sont de petite taille, soit de 0,5 et de 1 mm respectivement, ce qui les rend peu visibles à l’œil nu. Ces deux premiers stades se nourrissent sur de petits mammifères (surtout la souris à pattes blanches) et des oiseaux, tandis que les adultes se trouvent plus volontiers sur des chevreuils. Tous les stades peuvent se nourrir chez l’humain. Au stade larvaire, la tique possède trois paires de pattes, mais quatre aux autres stades. Un dimorphisme sexuel est marqué seulement chez l’adulte. Les antennes sont absentes. Certaines parties des pièces buccales sont couvertes de crochets qui ancrent la tique solidement à la peau de son hôte.
À chaque stade de développement, la femelle ingère une grande quantité de sang, soit de 10 à 100 fois son poids initial, ce qui distend grandement son abdomen. En général, l’accouplement a lieu sur l’hôte. La femelle produit plusieurs centaines d’œufs qui tombent directement sur le sol. Les mâles, quant à eux, ne se nourrissent que très peu ou pas du tout.
Puis, quand elle le désire, la tique se laisse tomber de son hôte, mue directement sur le sol et continue son cycle. Elle s’éloigne très peu du site où elle tombe sur le sol et peut résister au jeûne pendant plusieurs mois. Pour la majorité des espèces de tiques, chaque stade se nourrit sur un hôte différent.
Le cycle de développement d’Ixodes scapularis s’étend sur au moins deux ans.

Pathogénie, Modes d’infestation
La tique injecte à son hôte de la salive qui présente des propriétés variées : vasodilatation, anticoagulant, immunosuppression, anti-histaminique, neurotoxine… Ces propriétés facilitent l’alimentation de la tique, combattent les effets du système immunitaire de l’hôte et favorisent le transfert d’agents infectieux, tels que virus, bactéries, rickettsies, protozoaires et même des filaires. L’infection de l’hôte peut se faire non pas par la piqûre de la tique, mais plutôt par une contamination cutanée. Le fait que la tique se nourrisse successivement chez plusieurs animaux différents, facilite cette transmission.
L’agent infectieux peut alors se répandre dans tout le corps de l’hôte ou affecter des organes en particulier, avec un éventail de symptômes plutôt variés, tels que fièvre, malaises, maux de tête, anémie, irritation cutanée, problèmes divers allant jusqu’à la mort.
Chez l’humain, il semble que les enfants constituent le principal groupe à risque, suivi par les personnes qui enlèvent les tiques à l’animal et les manipulent sans se protéger.

Tableau 2. Principaux agents pathogènes transmis en Amérique du Nord

 Agent pathogène

 Maladie

 Tique responsable de la transmission

 Canin et Félin

 

 

 Borrelia burgdorferi

 Borréliose de Lyme*

 I. scapularis

 Bartonella vinsonii

 Bartonellose

 R. sanguineus

 Ehrlichia canis, E. chaffeensis

 Erlichiose

 R. sanguineus, D. variabilis

 E. ewingii

 Erlichiose

 A. americanum, I. scapularis

 Babesia canis, B. gibsoni

 Babésiose

 R. sanguineus

 Anaplasma platys, A. phagocytophilum

 Anaplasmose

 R. sanguineus, I. scapularis

 Rickettsia rickettsii

 Fièvre pourprée des Montagnes

 D. variabilis

 Cytauxzoon felis

 Cytauxzoonose

 D. variabilis

 Hepatozoon americanum

 Hépatozoonose

 A. americanum

 Toxine

 Paralysie à tique

 D. variabilis

 

 

 

 Humain

 

 

 Borrelia burgdorferi

 Borréliose de Lyme*

 I. scapularis

 Ehrlichia chaffeensis, E. ewingii

 Erlichiose

 D. variabilis, A. americanum

 Babesia microti

 Babésiose

 I. scapularis

 Francisella tularensis

 Tularémie

 I. cookei, I. scapularis, D. variabilis, D. andersoni, H. leporispalustris

 Anaplasma phagocytophilum

 Anaplasmose

 I. scapularis

 Rickettsia rickettsii

 Fièvre pourprée des Montagnes Rocheuses

 D. variabilis, D. andersoni
 A. americanum

 Coxiella burnetti

 Fièvre Q

 D. variabilis, D. andersoni, H. leporispalustris

* Borréliose de Lyme ou maladie de Lyme : maladie transmise par les tiques la plus fréquente en Amérique du Nord, surtout au mois de juin et juillet.

Traitement
Par traitement, on entend ici l’enlèvement de la tique. Attention! Pour éviter d’être contaminé, prenez certaines précautions.
* Enlevez la tique ET ses pièces buccales, c’est capital! Car ces dernières peuvent irriter la peau pendant des semaines et laissent échapper des liquides contaminant la plaie de l’animal ou du manipulateur.
* Portez des gants, car les agents pathogènes peuvent traverser la peau.
* Enlevez la tique avec une paire de pinces à bouts fins. Pour se faire, saisissez la tique par sa partie antérieure, aussi près que possible de la peau, en exerçant une traction constante et perpendiculaire au plan de la peau, jusqu’à ce que la tique lâche prise. Cela peut prendre plusieurs minutes. N’exercez jamais de torsion avec la pince durant la traction. Évitez d’écraser la tique, ce qui forcerait des liquides possiblement infectieux à sortir du parasite.
* À éviter absolument : Enduire la tique de gelée de pétrole, de vernis à ongles ou d’alcool à 70 %; appliquer le bout d’une allumette juste éteinte pour brûler l’abdomen de la tique (occasionne souvent des brûlures à la peau de l’animal). Car ces trucs ne provoquent pas le détachement du parasite, même après plusieurs heures.
* Pour compléter l’action, appliquez sur votre animal des médicaments préventifs, dont les perméthrines.
* Débarassez-vous des tiques de façon hygiénique, en les mettant dans de l’alcool, sans jamais les toucher à mains nues.
* Désinfectez la plaie et lavez vos mains avec un savon au plus vite. De plus, notez bien les endroits où vous avez retiré les tiques.
* Pour identifier et tester chaque tique, amenez-les chez le médecin vétérinaire afin qu’il les envoie à un laboratoire spécialisé.

Prévention
La prévention contre les tiques comporte plusieurs volets : utiliser des produits préventifs et répulsifs, éviter les habitats propices aux tiques, se tenir dans les sentiers battus en évitant les bosquets, toujours bien examiner la fourrure animale au retour d’une randonnée, réduire le nombre de tiques en les enlevant sans tarder…
Sachez que les produits prennent de 24 à 48 heures avant de tuer la tique qui, une fois morte, peut rester attachée pendant 24 heures. De plus, certains facteurs influencent leur efficacité : longueur et densité de la fourrure, sensibilité propre à chaque espèce de tiques, rapidité du traitement.
Pour l’humain, la tenue vestimentaire permet une protection partielle : vêtements de couleur pâle, chemise à manche longue, pantalons longs avec le bas à l’intérieur des chaussettes, chaussures fermées. Les tiques peuvent survivre au lavage des vêtements à l’eau froide, mais meurent à la chaleur de la sécheuse.
Depuis 1998, aux États-Unis, la vaccination humaine est disponible. Chez le chien, la vaccination est plus controversée.
L’éradication est impossible, puisque les tiques se nourrissent surtout chez des animaux de la faune. Cependant, à cause d’une augmentation d’Ixodes scapularis dans l’environnement, la santé publique instaure des mesures spéciales, incluant la déforestation et l’application d’insecticide dans des zones d’intervention choisie. Dans les maisons et les chenils, on aura recours à l’occasion aux services d’un spécialiste en extermination, surtout lors d’une infestation à Rhipicephalus sanguineus.
www.entomology.cornell.edu/MedEnt/TickBioFS/TickBioFS.html


Références
Alain Villeneuve, D.M.V., Ph. D.
Médecin vétérinaire, professeur de parasitologie
Faculté de Médecine Vétérinaire, Université de Montréal, Saint-Hyacinthe, Québec, Canada
Auteur du livre: « Les zoonoses parasitaires : l’infection chez les animaux et chez l’homme »
Éditions: «Les Presses de l’Université de Montréal», 2003
www.medvet.umontreal.ca


Caroline Fortin, D.M.V.

Médecin vétérinaire
www.ABC-Animal.com
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